Une laine filée "woolen" (je ne trouve pas de joli équivalent en français, mais vos suggestions sont les bienvenues), c'est le contraire à tous égards, d'une laine peignée (filée avec les fibres bien parallèles... ce qui aurai beaucoup plu à Desproges)... mais la pauvre, ce n'est pas sans conséquence....
D'abord on lui met les fibres en bataille, ensuite on la file d'une seule main en laissant la torsion attraper les fibres à la va comme je te pousse, sans trop de torsion, en buvant une bière... et puis, fini la décontraction, il faut retordre et c'est là que les choses sérieuses commencent!
Dans un fil laineux, la structure est dans le retord, c'est lui qui donne sa solidité au fil (contrairement au fil peigné), éventuellement sa régularité, car l'assemblage de plusieurs fils permet de compenser les irrégularités de chacun. Le mieux est de patienter 24 à 48 heures avant de retordre les célibataires, ils seront plus stables et auront moins tendance à casser.
C'est à peu près ce que je me suis employée à faire dès que j'ai eu ma cardeuse, lors de mes premiers tests, et je croyais en être quitte pour ma peine....que nenni!
Les finitions sont essentielles, c'est que j'ai appris dernièrement, en feuilletant une bible du filage: The Intentional Spinner de l'excellente Judith MacKenzie.
Bref, on peut pas filer trop cool, façon Woodstock, ça finit toujours avec des représailles....
J'emploie volontairement ce mot à dessein, car quand j'ai lu les explications qu'elle donnait, j'ai cru que j'avais mal compris...
Elle propose de faire subir au fil une série d'opérations que je croyais ABSOLUMENT INTERDITES sous peine de te retrouver avec une grosse boule de feutre entre les doigts.
Comme je suis restée un peu incrédule, je me suis dit que j'allais faire un petit reportage en image, histoire de partager cette expérience, et qu'on voie ensemble si cette allumée de Judith a raison, ou pas.
Le candidat au martyr avant le supplice, soit quelques mètres de BFL/Soie filés en woolen et retordu à trois brins (ici retord navajo). Un petit conseil, attachez bien votre écheveau en plusieurs endroits avec des petits liens, car vu ce qui va suivre, ça vous permettra de lui redonner forme ensuite.
L'installation: à gauche une bassine d'eau très chaude (env. 60°C) et savonneuse (liquide vaisselle bio), à droite une bassine d'eau froide. Ci-dessous un ustensile pour agiter.
Donc, on commence par plonger l'écheveau dans l'eau chaude et savonneuse.
Puis on remue la laine dans son bain à l'aide de l'ustensile choisi.
Puis on l'extrait de ce bain chaud, on l'essore rapidement avec la main (attention de ne pas se bruler, prévoir éventuellement en gant) pour la plonger dans le bain froid, sisisi.
Et on recommence ainsi trois à quatre fois de suite en finissant toujours par un bain froid.
D'après Judith, on sait que c'est bon quand le fil commence à s'épanouir (il gonfle et devient duveteux)... je crois que c'est bon, là.
Ensuite on revient à des moeurs plus civilisés, enfin presque... on démêle son écheveau grâce aux petits liens du début, on l'essore dans une serviette... et puis on le frappe vigoureusement contre une surface plane pour ouvrir au maximum les fibres et avoir un joli gonflant( pas fait de photo, c'est trop gore)... faut souffrir pour être beau...
Et puis on le suspend, sans aucun poids pour conserver toute son élasticité, à l'admiration du public, en attendant qu'il sèche.
Donc, apparemment Judith n'a pas trop fumé la carpette, les écheveaux n'ont pas feutré. Rendez-vous demain ou après demain pour des images des fils secs, que l'on puisse comparer.
Et vous, comment finissez vous vos fils "laineux"?
Super reportage ! J'adore la texture que tu as obtenue.
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